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DOIT-ON CONTINUER A EXCLURE LES HOMOSEXUELS DU DON DE SANG ?

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CONTRIBUTION

Depuis 1983, les homosexuels sont considérés comme une population à risque et ne peuvent donner leur sang. En  2015, encore, tout don étant précédé d'un questionnaire  et d'un entretien avec un médecin, la simple   déclaration d’une seule relation sexuelle entre hommes exclut pour l’heure  à vie le candidat, même si  cette relation a eu lieu 20, 30 ou 40 ans auparavant. ..

 

Mais ce qui était compréhensible lors  de l’explosion de l’épidémie du Sida a-t-il toujours autant de sens, 32 ans après ?

 

Deux avis récents illustrent la difficulté à prendre une décision: Le 31 mars le Comité Consultatif national d'éthique,   sollicité par la ministre de la Santé Marisol Touraine a affirmé que l'exclusion des homosexuels masculins  du don du sang devait être  maintenue. Mais voila que  le 3 avril l'Assemblée nationale a,  de son coté,    voté  à l'unanimité un amendement proclamant que  ”nul ne peut être exclu du don de sang en raison de son orientation sexuelle”.

 

 Entre principe de précaution et principe d’égalité, que choisir ?

 

D’un coté, l’Etablissement français du sang, créé en 1998  suite au scandale du sang contaminé, argumente que parmi les nouveaux cas d’infection par le VIH (environ 6000 par an) les hommes ayant eu des relations avec d’autres hommes représentent plus de 40% ; le risque étant  plus grand d'être contaminé dans la population homosexuelle que dans la population hétérosexuelle, il  conviendrait donc de continuer à exclure les homosexuels du don de sang.

 

De l’autre, les associations dénoncent la poursuite d’une telle interdiction car elle contribue selon elles à assimiler homosexualité et séropositivité. Elles mettent en avant que ce sont les  comportements à risques qui devraient aboutir à une exclusion, pas le fait qu'on soit homosexuel ; certains hétérosexuels pouvant   avoir autant de pratiques à risque que certains  homosexuels.

 

Et l’été dernier, l’avocat général de la Cour européenne de justice, Paolo Mengozzi,  leur a  donné raison en déclarant que  "le seul fait pour un homme d'avoir eu ou d'avoir des rapports sexuels avec un autre homme ne constitue pas un 'comportement sexuel' qui justifierait l'exclusion permanente d'un tel homme du don de sang". "En excluant de manière définitive du don de sang tout homme ayant eu ou ayant des rapports sexuels avec un autre homme, la réglementation française introduit une évidente discrimination indirecte fondée, de manière combinée, sur le sexe (les hommes) et sur l'orientation sexuelle (l'homosexualité et la bisexualité)"

 

 Existe-t-il au final  une solution qui rassure les uns et répondent aux autres ?  Peut-on en clair réduire les risques à néant ? Et bien oui!

 

 Tous les échantillons de sang prélevés  sont testés. Le problème qui se pose se nomme la fenêtre virologique : Pendant une période de 10 jours à 20 jours (selon le type de VIH) après contamination, le virus est invisible dans les tests sanguins,  donc indécelable ; et en cas de transmission sanguine de sang contaminé, le risque est évident.

 

 La solution a été préconisée par le député Olivier Véran , également neurologue au CHU de Grenoble,  qui  dans un rapport  remis dès 2013  à  la ministre de la Santé Marisol Touraine, affirmait :"Les experts s’accordent à dire que la mise en quarantaine systématique du plasma, associée au dépistage virologique, permettrait de neutraliser tout risque de transmission virale." Une solution jugée  même "optimale" par l'avocat général de la Cour européenne de justice.

 

Alors pourquoi ne met-on pas en œuvre une telle mesure ? Question de coût ? Autoriser le don du sang pour les homosexuels coûterait peu mais  Il s'agirait surtout  d'une décision hautement symbolique et qui nécessite du courage politique pour répondre à ceux qui ne manqueront pas de hurler au scandale… Le pas a été pourtant franchi dans d’autres pays : En Europe, 10 des 28 pays de l'UE sont passés ainsi d'une exclusion permanente à des contre-indications temporaires. En Italie, Espagne ou Pologne, les exclusions temporaires sont les mêmes pour les hétéros ou homosexuels…

 

Alors  il est  sans doute temps d’exhumer les écrits de 2012 d’un certain François Hollande à l’association SOS homophobie: «   Oui, je mettrai fin à l’exclusion du don de sang, parce que chaque prélèvement est contrôlé d’abord, et parce qu’il est dévastateur à tous les niveaux d’accréditer une forme de présomption de séropositivité des hommes homosexuels. Il n’y a pas de « population à risques », mais des « pratiques à risques ».

 

Que l’on passe enfin de la parole aux actes ! Et que l’on n’oublie surtout  pas dans le même temps de  développer les efforts de prévention. Que tout le monde puisse donner ou recevoir du sang sans crainte !

Beñat Gachen

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