Un tract devrait être distribué dans toutes les écoles et tous les collèges du 64 par la Manif pour Tous déguisée en Collectif de Parents d'Elèves du 64...Le début du papier est édifiant: "PARENTS ! ATTENTION! L'école va inciter votre enfant dès 6 ans à choisir sa future orientation sexuelle, masculin, féminin, neutre, autre". Car le nouveau cheval de bataille des anti-mariage pour tous est l’invasion de la « théorie du genre » qui se glisserait partout et notamment à l’école à travers un programme expérimental dans notre académie de Bordeaux intitulé « l’ABCD de l'égalité » ; à leurs yeux un sombre complot des LGBT alliés aux féministes : c’est tout dire !. On en rirait bien mais l’objectif de leur agitation est d'inquiéter les parents avec une campagne calomnieuse qui déforme largement le contenu et le propos de "L'ABC de l'égalité" car la réalité de cette expérimentation est de lutter dès le plus jeune âge contre les discriminations homophobes, les stéréotypes sexistes et les inégalités filles-garçons.
Détaillons d'abord ce qu’est cette expérimentation : « Les "ABCD de l'égalité" ce sont des outils pédagogiques, adaptés à chaque niveau scolaire, de la maternelle au CM2. Ils veulent permettre aux enseignants à la fois d'interroger leurs propres représentations mais surtout de sensibiliser les enfants aux stéréotypes, au respect mutuel, à la mixité et à la lutte contre les violences. Les enseignants spécialement formés et aidés par un kit pédagogique interrogeront donc les enfants sur leurs représentations à travers les situations d’apprentissage, dans la classe (sciences, éducation physique et sportive, maîtrise de la langue, etc.) et en dehors. Les parents seront associés à cette expérimentation et à son évaluation avant une généralisation à la rentrée 2014-2015 du programme sur tout le territoire. »
Et remettons en place quelques propos fumeux développés par la Manif pour Tous : d’abord , la "théorie" du genre n' existe pas ! Ce terme de « théorie » a été inventé par ceux la même qui veulent le stigmatiser. Leur démarche s’apparente à celle des conservateurs américains qui attaquent systématiquement l’enseignement de la biologie dans les écoles américaines en prenant pour cible la «théorie de l’évolution», aux côtés de laquelle il faudrait, d’après eux, enseigner la «théorie du dessein intelligent» - résurgence du créationnisme le plus antiscientifique.
Il existe par contre des études sur le genre. Apparue dans les années 70 aux Etats-Unis sous le terme de "gender studies", ces études s'interrogent sur les identités sexuées et sexuelles et sur la manière dont les normes se reproduisent jusqu'au point de paraître naturelles.Ces études abordent le fait que selon que l'on nait homme ou femme (d'un point de vue biologique), on ne sera pas éduqué de la même façon. Le concept du genre ne dit pas que le bébé nait asexué, mais que, selon son sexe biologique (c'est à dire s'il nait garçon ou qu'il nait fille) il sera éduqué différemment.
Le genre en tant que concept permet donc d'étudier plusieurs pans de nos sociétés : le travail (via les inégalités salariales entre hommes et femmes par exemple), la politique (avec la question de la parité et de l'accès à des postes de pouvoir), l'histoire (comment les femmes ont pu conquérir leurs droits politiques par exemple, ou bien comment on considérait les femmes au XVIème siècle).
Accréditer l’idée selon laquelle des analyses forment une théorie visant à nier l’existence de différences entre les êtres humains, alors que ces travaux cherchent à penser le sens de ces différences et les effets politiques et sociaux qui s’y attachent, est tout simplement pathétique.